Page:Collectif - Célébrités contemporaines, Vol 2, 1883.djvu/219

Cette page n’est pas destinée à être corrigée.

réputation, de plus en plus il l’a laissée se développer dans son esprit et dans ses livres jusqu’à prendre, à certains moments, toute la place comme dans ses deux comédies philosophiques et dans ses Souvenirs, il me semble qu’il lui doit le meilleur de son talent, comme il lui doit les plus sincères de ses admirateurs. La grande quantité de science qu’il a dépensée dans son Histoire des Origines du Christianisme n’aurait pas suffi à lui conquérir cette place presque suprême qu’il occupe dans l’opinion contemporaine, si un souffle n’avait couru à travers toutes les pages de ses livres d’érudition, souffle de vie et d’âme. Dans une époque d’universel tumulte et d’effrénée dépense de forces, l’auteur de la Vie de Jésus reste le représentant d’un culte presque aboli. Il a la religion de la vie intérieure. Il continue de croire que l’existence n’a de prix qu’interprétée, que transfigurée par un Idéal. À cause de cela, même son scepticisme à l’endroit des formes de cet Idéal n’est pas meurtrier, même son dilettantisme reste noble, même ses négations n’aboutissent pas à la sécheresse. S’il y a un fond de pessimisme dans sa pensée, la chatoyante et lumineuse surface empêche de l’apercevoir. C’est la poésie