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prise, quel beau petit dieu irrité ! « Petit comme une ail », mais si beau !

— Ah ! vous avez entendu ça ? Mes compliments, vous avez l’oreille bonne. Je pourrais vous répondre que… ça ne vous regarde pas…

— Oui ; mais je suis trop gentille pour que vous me répondiez d’une si vilaine façon.

— L’histoire du lycée Boileau ? Une pure infamie, et que je n’oublierai pas, tant que je vivrai ! Mon père… ça vous apprendra peut-être à le connaître mieux, vous qui le gobez. Il m’a fait là quelque chose…

(C’est inouï ce qu’il a l’air « chetit », ce petit ! Toute ma curiosité bouillonne.)

— Dites-moi l’histoire, je vous en prie.

— Eh bien… Vous savez, Charlie ?

— Si je sais !

— Voilà. Quand je suis entré comme externe au lycée Boileau, Charlie devait en sortir l’année suivante. Tous ces garçons mal tenus, avec des poignets rouges et des cols sales, m’ont écœuré ! Lui seul… J’ai eu cette impression qu’il me ressemblait, à peine plus âgé ! Il m’a longtemps regardé sans me parler,