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PROMENADE EN HOLLANDE.

Comme vous le voyez par leurs portraits, ils avaient à cette époque quelque chose qui fascinait et imposait la sympathie universelle : dans leur regard éclatait cette belle flamme orientale, signe caractéristique de la grande race juive. C’était une transmission lointaine, car eux étaient issus de parents chrétiens ; mais le mélange des Bataves et des Juifs s’est opéré en Hollande par tant d’unions ostensibles ou clandestines, qu’on ne saurait déterminer l’influence du sang inconnu des aïeux. Seulement, je crois que c’est à ce mélange heureux que nous devons ce qu’il y a d’imagination, de force et d’originalité dans notre nation.

« Vous avez aussi du sang juif dans les veines ? dis-je au docteur.

— Je le pense, » répliqua-t-il. Puis il poursuivit : Georges et Guillaume s’éprirent bientôt de Rosée et de Marguerite, avec cette chaleur de sang et cette âpreté de volonté qui caractérisent les Orientaux. Quand ils parlaient d’elles, on aurait cru, aux images brûlantes dont ils se servaient, qu’ils célébraient la beauté de la Sulamite. Nous n’avions connu à Leyde que quelques jeunes filles vulgaires ; aussi la beauté, les costumes poétiques et la distinction de Rosée et de Marguerite en firent-elles pour mes amis comme une apparition fantastique qu’il fallait saisir, sous peine de ne jamais plus la rencontrer dans la vie. Ils avaient à peine tous deux vingt-trois ans !