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PROMENADE EN HOLLANDE.

jamais de la réalité. Elles aimaient passionnément les romans, mais surtout les romans allemands, suédois et anglais ; l’étude et la glorification du home les captivaient comme un exemple attrayant et une chère espérance. Des romans français, elles n’avaient voulu connaître que les œuvres de sentimentalité pure. Quant aux livres si profondément psychologiques de notre grand Balzac, elles hésitèrent longtemps à les ouvrir, et Marguerite seule s’y aventura dans un jour de dépit et de révolte où une lettre attendue du bien-aimé n’arrivait pas ; elle puisa dans la lecture de ces études si fortes et si vraies comme un esprit nouveau, qui établit entre elle et Rosée une sorte de dissidence de pensée.

C’est depuis ces hardies lectures que le docteur trouva Marguerite plus alerte et tout à fait décidée à en finir avec l’attente : il est vrai que cette attente avait duré quinze ans !

Quand nous nous séparâmes, j’embrassai les deux amies et leur souhaitai du fond du cœur tout le bonheur auquel leur patience amoureuse leur donnait droit.

À peine me retrouvai-je dans la voiture du docteur, que je lui dis avec une sorte de vivacité impérative :

« Eh docteur, leur histoire ?

— Dites-moi d’abord, répliqua-t-il en riant, comment vous les trouvez.