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PROMENADE EN HOLLANDE.

est resté incrusté depuis le siége mémorable de 1572. Harlem fut investie durant sept mois par le duc d’Albe, qui fit périr la moitié des habitants après s’être emparé de la ville.

L’église de Harlem renferme le fameux orgue tant cité ; c’est l’ouvrage de Christian Muller, qui y travailla plusieurs années, et l’acheva en 1758. Cet orgue est supérieur à celui de Rotterdam dont j’ai parlé ; sa hauteur est de trente-six mètres et sa largeur de dix-sept ; il a cinq mille tuyaux et douze soufflets. En termes d’organiste, soixante voix sont enfermées dans cette puissante machine : le bourdon, le tonnerre, la viole de Gamba, la trompette, la cloche, la voix humaine, enfin tous les instruments d’un orchestre complet se trouvent là réunis. Les effets de l’orgue redoublent de grandeur quand l’église est vide et que toutes les portes en sont fermées ; c’est ainsi que je l’entendis en compagnie de quelques voyageurs. Le multiple et gigantesque instrument exécuta la fameuse pastorale de Beethoven avec une maestria qui défiait tous les orchestres connus ; les transitions du gracieux, du naïf et de l’énergique, se fondaient dans ce jeu savant. L’âme subissait l’impression irrésistible ; elle palpitait sous les sons magiques, tour à tour sereine, émue, agitée et raffermie.

Cette suite rapide de sensations m’avaient plus remuée qu’un long spectacle. Je sortis de l’église en