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PROMENADE EN HOLLANDE.

ballade allemande : un spectre et une jeune fille vivante. Qu’en dites-vous, Marguerite ? »

Celle-ci ne répondit point.

« Vous êtes aussi enfants et aussi inexpérimentés qu’au jour de la séparation, repris-je, et, à l’heure qu’il est, vous ne lisez pas mieux dans vos propres cœurs que vous n’y lisiez alors. Je dois donc y lire moi-même et vous diriger.

— Que signifient ces paroles ? dit Rosée.

— Elles signifient que la destinée a bien fait de vous séparer durant quinze ans : car, si votre mariage s’était accompli, vous auriez été bientôt profondément désunis.

— Comment l’entendez-vous ? fit Guillaume avec curiosité.

— Je suis certain, repris-je, que vous vous êtes alors trompés sur votre amour. Ne me répondez pas, de grâce ; descendez d’abord dans votre cœur, et osez y définir nettement les émotions présentes.

— Est-ce une énigme que vous nous posez ? s’écria Marguerite avec un petit rire saccadé.

— En tout cas, en voici brutalement le mot : Georges est fait pour vous, ma rieuse ; et Guillaume pour vous, ma dolente, » ajoutai-je en me tournant vers Rosée, qui me regardait avec de grands yeux vagues.

Ils restèrent tous les quatre frappés d’étonnement, sans trouver un mot à me répondre.