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PROMENADE EN HOLLANDE.

le cœur de celles-ci s’était tellement amolli qu’il s’en répandait à toute heure sur Rosée et sur Marguerite un concert de bénédictions.

Elles vécurent ainsi trois ans, de cette vie d’intérieur pleine d’angoisses et de suavité ; vie d’émotions cachées que les femmes seules connaissent bien, vie patiente, délétère ou fortifiante, qui tue les unes et raffermit les autres.

Les deux veuves moururent l’une après l’autre, à un mois de distance. Je venais d’être reçu docteur et de m’établir à Rotterdam ; ce fut moi qui leur donnai les derniers soins et qu’elles chargèrent de leur suprême volonté ; elles avaient fait un dépôt secret de leur fortune, qui ne devait être remise entre les mains de leurs fils que le jour où ils épouseraient enfin leurs fiancées.

Les veuves mortes, leur maison se ferma comme s’était fermée celle de Van Hopper.

Marguerite et Rosée allèrent demeurer dans leur habitation du Plantage. Elles n’y reçurent que moi et quelques personnes étrangères que je leur conduisais parfois pour les distraire. Elles fuyaient la société de Rotterdam, dont elles redoutaient les sarcasmes.

Elles firent savoir par des lettres touchantes, dont les larmes effaçaient les mots, la mort des deux mères à leurs fiancés. Moi-même j’écrivis dès lors à Guillaume et à Georges, non plus en camarade de plaisir,