Page:Colet - Lui, 1880.djvu/85

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 64 —

n’est-il pas là ? Et comment y suis-je, moi ! Ah ! je devine, il est peut-être dans votre chambre attendant tranquillement que je vous aie donné le spectacle de mon esprit.

En me disant ces mots d’une voix mordante, il alluma une cigarette, prit son chapeau et, me saluant presque cérémonieusement, il se disposa à sortir.

— J’ignore, lui dis-je, quelle interprétation vous donnerez à ce que je vais faire, mais suivez-moi ; et prenant un bougeoir, je le conduisis dans ma chambre où mon fils dormait.

— Voilà qui veille sur moi et qui m’attend, ajoutai-je en lui montrant le petit lit de l’enfant.

— Eh bien ! alors, aimez-moi et sauvez-moi de la vie que je mène, s’écria-t-il en s’emparant de mon bras qu’il étreignait ; il en est peut-être encore temps, vous me guérirez !

— Restons-en sur ce mot là, lui dis-je, oui, je veux vous guérir, vous voir, vous entendre, raffermir votre âme, mais n’ayez plus de ces élans auxquels je ne peux répondre et qui nous sépareraient, ce qui pour moi serait une douleur.

— Suis-je bête, dit-il en ricanant et en s’éloignant de moi ; vous n’êtes pourtant point taillée comme une femme mystique, et si l’amant n’est pas dans la chambre il est à coup sûr dans le cabinet de toilette. D’un geste, je lui montrai la porte en lui disant :

— Bonsoir, M. de Lincel.

— Bonne nuit, marquise ; je vais me divertir un peu