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qu’elle rayonnait à l’égal des lustres qui éclairaient la salle à giorno. Sa poitrine et sa gorge, un peu maigres, se dissimulaient sous un large collier byzantin en diamants, émeraudes et rubis ; sur sa tête c’était toute une résille des mêmes pierreries, où se jouaient gracieusement ses cheveux ; sa tunique de gaze d’argent, parsemée de renoncules rouges, était le point de mire de tous les spectateurs ; le fard aidant, sa piquante beauté était ce soir-là fort attrayante.

Stella la complimenta sur sa toilette.

— Et vous, vous ne me dites rien, fit-elle en me tendant la main et en secouant la mienne en cadence.

— On ne parle pas aux astres ni aux déesses, répondis-je, on reste ébloui, anéanti ; c’est ce qui arrive aux Hindous dans leurs pagodes, lorsqu’on découvre à leurs yeux les images en or et en pierreries des incarnations de leurs dieux.

— Je vois bien, reprit-elle, que vous vous moquez de moi et que vous me trouvez trop parée ; soyez tranquille, cette nuit, pour la fête, j’aurai un tout autre costume.

L’orchestre préluda ; l’air du carnaval de Venise se fit entendre et bientôt l’attention de la salle entière se détourna de Zéphira pour se porter sur la scène. La toile s’était levée ; le théâtre représentait une cour moresque aux galeries en arcades, avec des vasques de marbre blanc où tombaient sur l’eau les fleurs des orangers et où se miraient les lauriers-roses. Le directeur de