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vers un banc en gémissant ; elle m’entendit et revint à moi. Elle fut tout à coup affectueuse, caressante, presque passionnée, et semblait disposée à m’accorder ce qu’elle m’avait si fièrement refusé quelques minutes avant. C’est qu’elle me voyait sous sa dépendance et qu’elle est de ces femmes qui veulent avant tout sentir qu’un homme leur est soumis, soit par une infériorité morale, soit par une faiblesse physique, soit même par une déchéance dont elles ont surpris le secret. L’idée de pouvoir faire d’une âme ou d’un corps à peu près ce qu’elles veulent les ravit. Après m’avoir accablé de tendresses auxquelles la très-vive douleur de mon pied me rendait presque insensible, elle m’aida à m’étendre sur le gazon, et couru chez elle prévenir ses domestiques ; deux laquais arrivèrent tenant un grand fauteuil sur lequel on me transporta à l’hôtel de la princesse. Elle avait fait disposer une chambre pour moi qui s’ouvrait sur le jardin à côté du grand salon du rez-de-chaussée. On me mit au lit, le médecin vint visiter ma jambe et me prescrivit l’immobilité pendant plusieurs jours. Je me soumis facilement à son ordonnance, car il m’était impossible de remuer le pied sans une horrible douleur.

J’étais donc devenu l’hôte forcé et la chose de la princesse ; j’étais comme ces taureaux cloués sur le flanc dans l’arène et qu’un toréador peut impunément aiguillonner et harceler du bout de sa lance. Elle pouvait me torturer à l’aise ; prendre son temps, son heure ; s’éloigner, revenir, et jouer sur mes nerfs