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LES CAHIERS

le ferai remplacer. » La dame d’honneur et la nourrice se firent une pinte de bon sang.

Le maréchal dit à la dame : « Donnez le prince à ce sergent, qu’il le porte sur ses bras ! » Dieux ! j’allonge les bras pour recevoir le précieux fardeau. Tout le monde vient autour de moi : « Eh bien ! me dit M. Duroc, est-il lourd ? — Oui, mon général. — Allons ! marchez avec, vous êtes assez fort pour le porter. »

Je fis un petit tour sur la terrasse ; l’enfant arrachait mes plumes et ne faisait pas attention à moi. Ses draperies tombaient très bas et j’avais peur de tomber, mais j’étais heureux de porter-un tel enfant. Je le remis à la dame qui me remercia et le maréchal me dit : « Vous viendrez chez moi dans une heure. »

Je parais donc devant le maréchal qui me donne un bon pour choisir un beau plumet chez le fabricant : « Vous n’avez que celui-là ? » dit-il. — Oui, général. — Je vais vous faire un bon pour deux. — Je vous remercie, général. — Allez, mon brave ! vous en aurez un pour les dimanches. »

Arrivé près de mes chefs, ils me disent : « Mais vous n’avez plus de plumet. — C’est le roi de Rome qui me l’a pris. — C’est plaisant ce que vous dites là. — Voyez ce bon du maréchal Duroc. Au lieu d’un plumet, je vais en avoir deux, et j’ai porté le roi de Rome sur mes bras près d’un quart d’heure ; il a déchiré mon plumet.