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partîmes pour Vienne à journées raisonnables, et nous arrivâmes à Schœnbrunn, dans ce beau palais où on nous laissa reposer jusqu’au règlement des affaires. La garde eut l’ordre de rentrer en France par étapes à petites journées. Quelle joie pour nous ! et bien nourris ! mais l’armée ne rentrait pas, il fallait que la paix fût signée, et nos troupes eurent le temps de se refaire. Les étapes n’étaient plus de vingt lieues ; c’était bien commode pour nous de trouver la nourriture prête en arrivant. Nous fûmes bien reçus en Bavière et nous repassâmes le Rhin avec des transports de joie en revoyant notre patrie.

Nous fumes reçus à Strasbourg et fêtés de ce bon peuple ; je fus droit à mon logement, où j’avais laissé mes effets en passant. Je trouvai tout dans un état parfait. Ces braves gens me tâtaient et me disaient : « Vous n’êtes pas blessé ? » Leur demoiselle disait : « Nous avons prié pour vous ; tout votre linge est bien blanc et vos boucles d’argent sont brillantes ; je les ai fait nettoyer par l’orfèvre. — Eh bien ! ma jeune demoiselle, je vous rapporte de Vienne un joli châle que je vous prie d’accepter. »

Elle devint rouge devant sa mère ; le père et la mère étaient ivres de joie. Je leur dis : c Si j’étais mort, c’était pour votre demoiselle. » Il me prit par la main : « Allons au café, me dit-il ; la garde fait séjour, vous aurez le temps de vous reposer. »