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DU CAPITAINE COIGNET.

tuèrent nos fourriers[1] à coups de masse, et eurent la hardiesse de venir prendre nos drapeaux dans le corps de garde chez le colonel, dans un bourg près de Burgos. Tous les hommes étaient endormis ; le factionnaire crie : Aux armes ! et il était temps ; ils sortaient du village. Ils furent pincés par nos grenadiers qui les passèrent à la baïonnette sans miséricorde[2]. — Voilà ce peuple fanatique.

Nous arrivâmes à Burgos et partîmes pour Vittoria. De là, nous passâmes la frontière pour nous rendre à Bayonne, notre ville frontière. Nous suivîmes toutes les étapes jusqu’à Bordeaux, où nous eûmes séjour.

Je fus logé chez une vieille dame qui était malade. Je me présentai avec mon billet de logement, et elle fut un peu effrayée de voir ma grande barbe. Je la rassurai de mon mieux, mais elle me dit : « J’ai peur des militaires. — Ne craignez rien, madame, je ne vous demande rien ; mon camarade est très doux. — Eh bien ! je vous garde chez moi ; vous serez nourris et bien couchés. »

Le bon logement ! Après dîner, elle me fit appeler par sa femme de chambre : « Je vous fais venir près de moi pour vous dire que je suis

  1. Les fourriers précèdent le corps en marche pour préparer le logement.
  2. Cet épisode en temps de paix pouvait faire présager ce que serait une guerre future.