Page:Clemenceau - Au soir de la pensée, 1927, Tome 1.djvu/374

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
367
COSMOGONIES

occidentale : les Grecs vers les Balkans, les Italiotes vers les Apennins, les Celtes vers l’Allemagne et la Gaule[1]. Trop de précisions en de telles matières ne vont pas sans de graves chances d’errer.

Beaucoup acceptent, jusqu’à nouvel ordre, ce thème ingénieux, appuyé de quelques indications positives. Il paraît bien acquis que les migrations dites indo-européennes, au lieu de remonter à des temps quasi fabuleux, furent de date relativement récente, peut-être de 1500 à 2000 ans avant notre ère. Cela aurait-il pu suffire aux développements des formations de nos jours ? Quant aux migrations qui les précédèrent, qu’en pouvons-nous savoir ? Tous ces mouvements, dont les causes profondes nous sont inconnues, se relient, de nécessité, les uns aux autres en des formes indéterminées.

En résumé, il est possible que, postérieurement à la fin du moyen empire égyptien, une partie des races indo-européennes, de langue aryenne (race nordique blonde des anthropologistes), ait quitté la région baltique pour descendre dans les plaines de la mer Noire. Une communauté d’origine entre Indiens et Baltes paraît attestée par des affinités notables entre le Lithuanien moderne et le sanscrit. Le reste des groupements, venu on ne sait d’où, aurait continué sa marche, après des stations qui purent durer des siècles, tantôt peut-être dans la Russie méridionale, tantôt dans le Pendjab envahi par la vallée de Caboul, ou le peuple indien proprement dit se constitua avant de passer du bassin de l’Indus dans la vallée du Gange, marquant la succession des temps védiques, cependant que les Dravidiens reculaient peu à peu pour s’installer dans la résistance passive où ils se sont maintenus. C’est à peu près tout ce que nous pouvons dire présentement de ce fameux « Berceau des Aryens » dont parlent les légendes Achéménides. Espérons que des informations nouvelles se préciseront quelque jour. Nous aurons peut-être alors des lueurs sur ces Baltes, chargés d’une telle puissance d’avenir. Comment se trouvaient-ils en ce pays ? Quels événements les y avaient amenés ? Observation et imagination s’obstineront toujours de compagnie à vouloir remonter le cours des âges.

  1. Cf. Albert Comoy. Les Indo-Européens, Bruxelles, 1921.