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la défensive.

ne tardent pas généralement à se produire dans ses rangs.

Quant à ce que le pays lui-même peut fournir, le défenseur s’en empare tout d’abord et l’épuise dans sa retraite, de sorte que son adversaire ne rencontre plus que villes et villages affamés, champs moissonnés ou foulés aux pieds, fontaines taries et ruisseaux troublés et fangeux.

Dans de telles conditions il n’est pas rare que, dès les premiers jours de sa marche en avant, l’armée attaquante ait à lutter contre les besoins les plus urgents. Elle ne saurait, en effet, compter sur la capture de quelques-uns des dépôts d’approvisionnement de la défense, car ce serait négligence impardonnable de la part de celle-ci que le fait pût exceptionnellement se produire.

Il est donc hors de doute que, lorsqu’il n’existera pas une trop grande disproportion de forces entre les belligérants et que la retraite pourra s’effectuer sur un espace suffisamment étendu, l’application de ce système amènera des résultats bien autrement considérables pour la défense que ceux que lui vaudrait une solution favorable obtenue vers la frontière. Cette manière de procéder n’augmente cependant pas seulement les chances de victoire par le renversement du rapport des forces, elle grandit encore les suites probables de la victoire, en changeant l’emplacement sur lequel celle-ci se produit. Quelle différence pour l’attaquant, en effet, à être battu quand il est encore à peu de distance de son propre territoire et que quelques journées de marche l’y peuvent reporter, ou à être vaincu en plein pays ennemi ! Dès que l’envahisseur a atteint son point extrême de pénétration, sa situation peut devenir telle que, parfois, le gain, même d’une bataille le contraigne à commencer son mouvement de