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les forces armées.

rait pas au delà de la portée de ses bras. De là vient cette expression que les avant-postes sont les yeux de l’armée. Mais le besoin de voir n’est pas toujours le même ; il a ses degrés. Les conditions de forces ou d’étendue, les circonstances locales ou particulières, la manière dont l’ennemi procède, le hasard même ont une grande influence à ce sujet. Il ne faut donc pas s’étonner de ne rencontrer dans l’histoire des guerres que les exemples les plus constamment différents de l’emploi des avant-gardes et des avant-postes, et par conséquent de n’en pouvoir déduire aucune règle si compliquée et si peu générale qu’elle soit.

Qu’y voyons-nous en effet ? Tantôt la sécurité de l’armée est confiée à une avant-garde spéciale, et tantôt à une longue ligne d’avant-postes isolés les uns des autres ; ici, les deux systèmes se réunissent ; là, on ne trouve trace ni de l’un ni de l’autre ; dans telle circonstance, les diverses colonnes de l’armée s’avancent sous la protection d’une seule et même avant-garde ; dans telle autre, chaque colonne a la sienne propre. Nous allons tâcher de nous faire une idée claire de la question, et voir si en agissant ainsi il nous sera possible de fixer quelques principes d’application.

Lorsqu’une troupe est en marche, un détachement plus ou moins fort constitue généralement son avant ou son arrière-garde, selon que le mouvement a lieu en avant ou en retraite. Cantonnée ou campée, elle est couverte, au contraire, par une ligne étendue de petits détachements ou avant-postes. Il est dans la nature des choses, en effet, que pouvant et devant couvrir de plus grands espaces quand elle est cantonnée on campée que lorsqu’elle est en mouvement, une troupe recoure à l’emploi d’une ligne d’avant-postes dans le premier cas, et à celui d’un corps concentré dans le second.