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Et le travail du village est d’enrichir de maints baquets la sauce : à quatre pattes, dedans, l’agriculteur la brasse et la délaie de ses mains. L’homme jaune ne mord pas dans le pain ; il happe des lèvres, il engloutit sans le façonner dans sa bouche un aliment semi-liquide. Ainsi le riz vient, comme on le cuit, à la vapeur. Et l’attention de son peuple est de lui fournir toute l’eau dont il a besoin, de suffire à l’ardeur soutenue du fourneau céleste. Aussi, quand le flot monte les noriahs partout chantent comme des cigales. Et l’on n’a point recours au buffle ; eux-mêmes, côte à côte cramponnés à la même barre et foulant comme d’un même genou l’ailette rouge, l’homme et la femme veillent à la cuisine de leur champ, comme la ménagère au repas qui fume. Et l’Annamite puise l’eau avec une espèce de cuiller ; dans sa soutane noire avec sa petite tête de tortue, aussi jaune que la moutarde, il est le triste sacristain de la fange ; que de révérences et de génuflexions tandis que d’un seau attaché à deux cordes le couple des nhaqués, va chercher dans tous les creux le jus de crachin pour en oindre la terre bonne à manger !