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étreintes, des batailles, des paysages, des multitudes, enserrés dans un petit espace, ressemblent à des sceaux. Cet homme éclate de rire, et, tombant, l’on ne sait s’il est homme encore, ou, écriture déjà, son propre caractère.


— Le Français ou l’Anglais horrible, crûment, n’importe où, sans pitié pour la Terre qu’il défigure, soucieux seulement d’étendre, à défaut de ses mains cupides, son regard au plus loin, construit sa baraque avec barbarie. Il exploite le point de vue comme une chute d’eau. L’Oriental, lui, sait fuir les vastes paysages dont les aspects multiples et les lignes divergentes ne se prêtent pas à ce pacte exquis entre l’œil et le spectacle qui seul rend nécessaire le séjour. Sa demeure ne s’ouvre pas sur tous les vents ; au recoin de quelque paisible vallée, son souci est de concerter une retraite parfaite et que son regard soit si indispensable à l’harmonie du tableau qu’il envisage, qu’elle forclose la possibilité de s’en disjoindre. Ses yeux lui fournissent tout l’élément de son bien-être, et il remplace l’ameublement par sa fenêtre qu’il ouvre. À l’intérieur l’art du peintre calquant ingénieusement sa vision sur la transparence fictive de son châssis a multiplié une ouverture imaginaire. Dans cet ancien palais impérial, que j’ai visité, emporté tout le magnifique et léger