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XXIV

M. Georges Torral à M. Jacques de Fierce.

« Mon petit, tu as quitté Saïgon l’esprit malade, — autant que j’en puis juger, moi qui n’ai plus l’honneur de tes confidences. Or, je prétends quand même être ton ami, et je viens te soigner. Voici mon remède : une pilule de vérité vraie ; avale et n’aie pas peur, ce n’est pas amer : il s’agit de Mévil, tu n’es pas en cause. Mais hodie mihi, cras tibi, hein ? Mévil est en train de gâcher piteusement sa vie, qui était belle et intelligente, — comme est la mienne ; — qui était une vie de Civilisé. Ce garçon lâche la raison pour l’instinct. Écoute son histoire, et fais-en ton profit, si tu peux.

« Mévil était un homme sensé, qui aimait les femmes, — toutes les femmes, sans préférence inepte pour celle-ci ou pour celle-là. Son désir, logique et précis, ne cherchait en elles que ce pour quoi elles sont faites : le coït. — C’était, sans conteste, un goût raisonnable. Mévil, en s’y attachant,