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Le défier en Roi, le vaincre aux yeux de tous.
Mais tout autre dessein est indigne de vous.

PORUS.

Hélas ! Quand tes discours échauffent mon courage
Que je hais les desseins que m’inspire ma rage !
Mais aussi quand je vois l’excès de mon malheur,
Que tes discours sont froids auprès de ma fureur :
Autrefois au seul bruit de ses grandes merveilles ;
Quand le nom d’Alexandre eut frappé mes oreilles
Avec le même effet je sentis dans mon cour
Allumer le désir d’attaquer ce vainqueur.
Quand j’appris qu’il venait fondre sur cette terre,
Mon âme avecque joie embrassa cette guerre,
Et me voir prévenu par ce fameux vainqueur
Est le seul déplaisir qui troubla ce bonheur.
Mais depuis quand le Ciel ennemi de ma gloire.
Dès le premier combat lui livra la victoire ;
Au malheureux moment qu’il mit dans sa prison
Ma femme et mes enfants ; je perdis la raison.
Comme d’un gouffre affreux de ce malheur extrême
S’élevèrent des maux pires que ce mal même ;
Je reste sans vertu, sans cour, sans jugement ;
Et tu vois un effet de ce dérèglement.
Mon dessein quel qu’il soit ne doit plus le surprendre ;
Je cherche mon rival ; et non pas Alexandre,
Et je cherche en rival, en amant, en jaloux ;
Un tyran qui ravit sa femme à son époux.