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didat. Ce n’est pas une mince affaire ; le malheureux ne sait pas, mais pas du tout, l’orthographe. On le voit le nez dans un livre, on le croit un savant fieffé ; ah bien oui : il étudie la grammaire. C’est sa fille, un ange brun, qui lui échenille son style. Et voilà qu’on la demande en mariage et qu’on parle de l’emmener à Étampes, et de plus, pendant qu’elle est absente, un électeur influent vient réclamer un certificat au malheureux qui écrit certificat avec un s ! Ah ! quelles anxiétés chez le pauvre diable, quelle « tempête sous un crâne obtus », et comme il dissimule chaque mot douteux sous un pâté d’encre !…

La fausse science, la pose, les ambitions niaises, tout le ridicule de notre race bourgeoise n’ont jamais été mieux fustigés, plus joliment, sans aigreur, bonnement, gaiement, que dans ces comédies de mœurs moyennes où Labiche excelle.

Encore une fois, c’est là un maître inimitable, parce qu’il n’a pas de manière à lui, parce qu’il est le naturel même, parce qu’il n’imite personne, ne s’inquiète que de divertir d’abord, de bien voir, de bien peindre et de faire juste. Chaste avec cela, honnête au point