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ces champs si vastes sont assez abondans pour que l'on n'ait pas à redouter de les voir jamais s'épuiser tout à fait. Leur richesse est si variée, qu’ils se prêtent à toute sorte de culture, et que même l’abondance des récoltes peut suppléer à leur qualité. J'ai donc aussi voulu glaner et joindre ma gerbe aux trésors dont ceux qui nous ont précédé ont enrichi la science de l'antiquité.

Mon projet n’avait d’abord été que de donner une description des antiques du Musée royal plus développée que celle que j'avais livrée au public en 1820. Elle devait être accompagnée de planches très-détaillées, qui eussent offert tous nos marbres et un choix de statues des divers musées et des collections de l'Europe. Mais ce n’eût été qu’un ouvrage du très-peu d'étendue et qu'une sorte de commentaire de la description que j'avais fait paraître, et qui avait été honorée d'un accueil assez favorable. Bientôt ce cadre me parut trop restreint, et ce recueil eût ressemblé à tant d'autres. Cependant, faisant la guerre à mes dépens, je ne pouvais avoir la pensée téméraire de lutter contre des colosses tels que les Musées du Vatican, du Capitole, la Galerie de Florence, les Musées de Dresde, du Louvre, œuvres immenses, riches de tout le luxe de la gravure et de la typographie, et qu’avaient produites, avec des sommes énormes, ou des gouvernemens ou des millionnaires. Si même de pareilles entreprises n'avaient pas été au dessus de mes forces, peut-être ne m'y serais-je pas livré. Ces ouvrages, et d'autres du ce genre, sont certainement d’une grande magnificence, et font honneur aux personnes auxquelles on les doit et aux pays où ils ont paru. Mais malheureusement leur utilité pour les arts et pour le plus grand nombre de ceux qui les cultivent n'est pas en raison directe de leur beauté. Destinés aux favoris de la fortune ou à de grandes bibliothèques, ils sont d'un prix qui leur met, pour ainsi dire, des entraves et les empêche de se répandre autant qu’on le désirerait. Souvent ils languissent, très bien et trop bien conservés, superbement reliés et très peu consultés, dans la bibliothèque du riche : mais il est bien rare qu'ils visitent l'atelier du peintre, du sculpteur ou même le cabinet du jeune savant, ou qu’ils y fassent un long séjour ; ils sont trop beaux pour braver la poussière. Ce ne sont pas les yeux et les mains auxquels ils seraient le plus utiles qui peuvent le plus librement ou les parcourir, ou les étudier. Je me décidai [IV]