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qu’il l’aurait reçue, son intention n’étant point, disait-il, d’entrer dans aucune discussion, mais, cet argent touché, de passer à l’instant dans une autre ville. Les Siciliens ne sont point des hommes qui se laissent traiter avec mépris, quand nos magistrats ne cherchent point à les avilir. Ce sont des gens qui n’ont pas moins de courage que d’économie et de tempérance. Tel est surtout, juges, le caractère des habitans d’Agyrone. Ils répondirent à ce misérable qu’ils paieraient la dîme comme ils la devaient, sans y rien ajouter, d’autant plus que Verrès avait porté le bail à un prix très-élevé. Apronius fit part de leur résolution à Verrès, qui y était le plus intéressé.

XXVIII. Aussitôt, comme si la ville d’Agyrone eût conspiré contre la république, ou chassé ignominieusement un lieutenant du préteur, les magistrats et les cinq premiers citoyens reçurent l’ordre de se rendre auprès de Verrès. Ils se rendent à Syracuse. Apronius se présente. Voilà bien, dit-il, les personnes qui ont enfreint l’édit du préteur. Ceux-ci demandent : quel édit ? il répond qu’il s’expliquera devant les commissaires instructeurs. L’équitable Verrès employait ce grand épouvantail pour intimider ces malheureux ; il les menaçait de leur donner des commissaires tirés de sa cohorte. Les députés d’Agyrone, que rien ne peut effrayer, déclarent qu’ils affronteront cette procédure. Le préteur charge de l’instruction Artémidore Cornelius, son médecin, l’huissier Valerius, le peintre Tlépolème, et d’autres commissaires de cette espèce. Il n’y en avait pas un qui fût citoyen romain ; tous étaient des Grecs sacrilèges (26), depuis long-temps fameux par leur scélératesse, et qui tout à coup étaient devenus des Cornelius (27). Les députés d’Agyrone voyaient bien que tout ce qu’avancerait Apronius devant une pareille com-