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jugé que Sylla n’avait pu faire aux citoyens les plus honorables une remise sur les fonds du trésor ; et des sénateurs jugeront, Verrès, que vous pouviez légalement en gratifier une infâme prostituée ! Celui dont le peuple romain ordonna par une loi que la volonté ferait loi pour tous les citoyens, a néanmoins été repris dans ce seul point, par respect pour les lois anciennes ; et vous, que toutes les lois tenaient enchaîné, vous avez voulu que votre caprice fît loi. À Sylla on fait un reproche d’avoir accordé des remises sur les fonds qu’il avait perçus lui-même, et vous, on vous permettra d’en avoir fait sur la somme des revenus du peuple romain !

XXXVI. Dans ce genre d’audace, Verrès a porté l’impudence encore plus loin à l’égard des dîmes de Ségeste (31). Il les avait adjugées à ce même Docimus, c’est-à-dire à Tertia, pour cinq mille boisseaux de blé, outre une subvention de quinze mille sesterces. Il obligea les Ségestains à racheter le bail à Docimus aux mêmes conditions ; ce que vous allez voir par la déposition officielle des Ségestains. Lisez cette déposition faite au nom de leur cité. Déposition de la ville de Ségeste. Vous avez entendu à quel prix Ségeste a racheté le bail de Docimus, savoir, cinq mille boisseaux de blé, outre la subvention. Connaissez maintenant quel est le prix que portent les registres du préteur. Loi pour l’adjudication des dîmes sous la prèture de C. Verrès. Vous voyez, dans ce seul article, une réduction de trois mille boisseaux sur le tribut ; et, après avoir fait ce retranchement sur la subsistance du peuple romain, sur la plus précieuse ressource de nos finances, sur l’aliment le plus pur de notre trésor, c’est à la comédienne Tertia qu’il en a fait don. Que blâmerez-vous le plus ? Son impudence d’avoir enlevé ce grain à nos alliés ? Son