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enfin de leur présence les villes et les campagnes. Aussi lorsque Philinus d’Herbite, homme éloquent, éclairé et d’illustre naissance, vous retraçait, au nom de sa commune, le désastre des cultivateurs, leur fuite et le très-petit nombre de ceux qui restaient, vous avez pu entendre, juges, les gémissemens du peuple romain, qui n’a jamais manqué d’assister en foule à cette cause. Mais je dirai dans un autre endroit combien la Sicile a perdu de cultivateurs.

XXXV. Maintenant je dois vous rappeler un fait que j’avais trop négligé. Car, au nom des dieux immortels ! cette diminution que Verrès s’est permise sur le capital d’un tribut, comment pourriez-vous, je ne dis pas la supporter, mais même en entendre parler ? Un seul homme s’est rencontré depuis la fondation de Rome (et fassent les dieux immortels qu’il ne s’en rencontre pas un second ! ), à qui la république s’est livrée tout entière, forcée par les circonstances et ses malheurs domestiques : c’est L. Sylla. Son pouvoir fut si absolu que nul ne pouvait, malgré lui, conserver ses biens, ni sa patrie, ni sa vie. Telle fut sa confiance audacieuse, qu’il ne craignit pas de dire à haute voix, en pleine assemblée, que, lorsqu’il vendait les biens des citoyens romains, c’était son butin qu’il vendait. Non-seulement nous subissons ses actes, mais, pour prévenir de pires inconvéniens, de plus grands maux, nous leur donnons la sanction de l’autorité publique. Un de ses décrets a cependant été réformé par un sénatus-consulte, qui décida que ceux en faveur desquels cet homme aurait retranché de l’impôt, rapporteraient les deniers au trésor. Le sénat a donc reconnu que celui à qui l’on avait concédé tous les pouvoirs n’avait pu légalement diminuer les impôts établis et perçus au nom du peuple. Le sénat en corps a