Page:Cicéron - Œuvres complètes - Panckoucke 1830, t.7.djvu/86

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Dans le premier discours, appelé aussi par les éditeurs de Quœstura, de Legatione, de Prœtura urbana, seu de Vita ante acta, l’orateur suppose que Verrès a l’effronterie de comparaître à cette seconde action ; il veut qu’on le condamne à un supplice extraordinaire, et que des crimes sans exemples soient punis d’une manière nouvelle.

Jamais on ne porta une accusation si terrible et si franche. On se souvient de tout ce que dit l’orateur à Hortensius dans le discours contre Cécilius dans la première action ; il l’apostrophe de nouveau, et il lui adresse des reproches presque aussi sanglans qu’à Verrès lui-même. Il conseille aux juges de rétablir l’honneur des tribunaux, et les menace de la vengeance et de la colère du peuple. En effet, les plaintes étaient si générales contre les juges de l’ordre sénatorial, que, malgré la fermeté que mirent Glabrion et ses assesseurs à ne point se laisser corrompre, malgré les dispositions sévères qu’ils montrèrent contre l’accusé, le peuple romain persista toujours à demander que l’administration de la justice fût confiée à une autre classe de citoyens. En effet, peu de mois après le procès de Verrès, on partagea le département des tribunaux entre les sénateurs et les chevaliers.

« On a peine à croire, dit le traducteur Desmeuniers, qu’un magistrat de Rome ait commis autant de crimes que Verrès, qu’il ait vendu la justice, qu’il ait volé d’une manière aussi publique, qu’il se soit livré aux derniers excès de la tyrannie ; mais tous les faits allégués par Cicéron furent prouvés. Chacun des gouverneurs et des officiers envoyés dans les provinces était coupable de quelques-unes de ces malversations ; et si on ne savait pas jusqu’à quel point Rome fit le malheur de la terre, les Verrines le démontreraient assez. Elles nous apprennent avec quelle insolence ces fiers républicains dépouillaient tous les peuples, et avec quelle audace ils rapportaient dans la métropole les monuments des arts qu’ils enlevaient aux étrangers.

« Quelque criminels que fussent les magistrats, l’administration punissait avec rigueur toute espèce de révolte. L’attentat de Verrès contre la fille d’un citoyen de Lampsaque, nommé Philodamus, fait frémir : les habitants de la ville veulent repousser ses émissaires par la force ; un licteur est tué, et on tranche la tête à un malheureux père qui a défendu la pudeur de sa fille, à un frère qui a protégé l’honneur de sa sœur. En racontant de pareils traits, l’orateur