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témoins ; un ou deux dirent quelques mots ; on ne leur fait aucune question. L’huissier prononce que la cause est instruite. Le préteur, comme s’il eût craint que Petilius, après avoir émis la cause civile dont j’ai parlé tout-à-l’heure, ne revînt prendre sa place au tribunal avec tous ceux qui l’avaient suivi, s’élance lestement de son siège ; et c’est ainsi qu’un homme innocent qu’avait acquitté Sacerdos, un accusé dont la cause n’avait point été plaidée, se vit condamné par le médecin, le greffier et l’aruspice de Verrès.

XXXI. Retenez, juges, retenez dans Rome un citoyen de ce caractère ; épargnez-le, conservez-le, afin que nous ayons un juge qui discute avec nous les intérêts de l’état, et qui, dans le sénat, donne sans partialité son avis sur la guerre et sur la paix. Au reste, le plus essentiel pour nous et pour le peuple romain, ce n’est pas de prévoir comment Verrès opinera dans le sénat. De quelle importance en effet sera jamais l’autorité d’un tel homme ? Quand osera-t-il même dire son avis, quand le pourra-t-il ? Dans quel temps un homme aussi voluptueux et aussi fainéant entreprendra-t-il de se rendre dans nos assemblées, si ce n’est au mois de février(57) ? Mais qu’il y paraisse, qu’il déclare la guerre aux Cretois(58), qu’il affranchisse les Byzantins(59), qu’il accorde à Ptolémée le titre de roi(60), que la volonté d’Hortensius(61) soit la base de ses discours et de ses opinions : cela ne nous importe guère ; cela du moins ne compromet directement ni notre vie ni nos fortunes.

Mais voici, juges, ce qui est capital ; voici ce qu’on doit redouter, et ce qui doit faire trembler les bons citoyens : si Verrès échappe à la vengeance des lois, il prendra nécessairement son rang parmi les juges ; il aura à prononcer sur l’existence des citoyens romains ;