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mais leurs ancêtres leur avaient tant de fois vanté les bienfaits du peuple romain envers les Siciliens, qu’ils croyaient devoir souffrir patiemment les injustices de nos gouverneurs. Nul magistrat, avant Verrès, n’avait encore entendu leurs cités déposer contre son administration ; elles l’auraient enfin supporté lui-même, si, conservant quelque chose d’humain, il ne se fût permis que des vexations ordinaires, ou simplement d’une seule espèce à la fois ; mais ne pouvant supporter sa débauche, sa cruauté, son avarice, son despotisme ; voyant toutes leurs prérogatives, tous leurs droits, tous les bienfaits du sénat et du peuple romain, anéantis par la scélératesse et le caprice d’un seul homme, ils ont résolu d’obtenir de vos arrêts la poursuite et la vengeance de tant de forfaits, ou, si vous les jugiez indignes de votre secours et de votre appui, d’abandonner leurs villes et leurs habitations, comme ils avaient déjà abandonné leurs terres, pour échapper aux vexations de ce tyran.

IV. Ce fut dans ce dessein qu’une députation générale de la province vint prier L. Metellus de venir le plus tôt possible prendre la place de Verrès ; c’est dans cette intention qu’ils ont tant de fois déploré leurs infortunes auprès de leurs protecteurs ; c’est dans la douleur dont ils étaient pénétrés qu’ils ont présenté des requêtes aux consuls, si l’on peut appeler requêtes ce qui n’était en effet qu’un acte d’accusation contre Verrès. Ils ont tant fait que moi-même, dont ils avaient connu la loyauté et le désintéressement, vaincu par leur affliction et par leurs larmes, j’ai presque oublié mes principes de conduite, pour me porter accusateur de Verrès ; ministère absolument étranger à mes goûts et au plan que je m’étais tracé, quoiqu’à vrai dire, dans cette cause, j’aie plutôt à jouer le rôle de défenseur que celui d’accusateur. Enfin, tous