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remis le pouvoir judiciaire. Je dois ici vous dire un fait dont je ne suis que trop convaincu, votre ordre a beaucoup d’ennemis ; il en est, je vous le proteste, qui portent la haine jusqu’à dire ouvertement qu’ils désirent que cet homme, dont ils connaissent cependant tous les crimes, soit acquitté, pour que le sénat, par suite de cette iniquité, se voie ignominieusement dépouillé des tribunaux. Si j’ai longuement insisté sur ce point, ce n’est pas que je me défie de votre équité, juges ; mais j’ai craint les nouvelles espérances de nos adversaires, qui, ramenant tout à coup Verrès de la porte de la ville au tribunal(29) ont donné lieu à quelques hommes honnêtes de soupçonner que ce n’était pas sans motif qu’il avait si subitement changé de résolution.

IX. Ici, pour mettre un terme aux plaintes d’Hortensius(30), qui sont d’un genre véritablement neuf ; pour qu’il ne dise pas que c’est de la part de l’accusateur écraser l’accusé, que de ne rien dire contre lui, et qu’il n’y a rien de plus préjudiciable aux intérêts de l’innocent, que le silence de la partie adverse ; pour qu’il ne fasse pas l’éloge de mon talent tout autrement que je ne voudrais, en disant que, si j’avais beaucoup parlé, j’aurais mis son client fort à l’aise, et que c’est en ne parlant pas que je l’ai perdu : je veux faire droit à ses plaintes ; je vais parler sans interruption, non qu’un discours suivi soit ici nécessaire, mais je suis curieux de voir ce qu’il aimera le moins de mon silence ou de mes paroles. Sans doute vous exigerez que je remplisse bien exactement toutes les heures que m’accorde la loi ; si j’en perds un seul moment, vous vous plaindrez, vous implorerez et les dieux et les hommes, vous vous écrierez qu’il n’y a plus pour Verrès aucun moyen de se défendre, puisque son accusateur refuse de parler aussi