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DOURDAN SOUS LES GUISES.

après, les ouvriers de Dourdan, plus habiles que ceux de la campagne, laissèrent à ceux-ci le tricot de laine et s’adonnèrent presque exclusivement aux bas de soie, dont le produit fut pour eux, pendant plus de deux siècles, une véritable fortune.

La mort du roi Henri II accrut démesurément la puissance du duc de Guise. La couronne retombait sur la tête de trois enfants. C’était un orage de près d’un demi-siècle qui commençait pour la France. Catherine de Médicis, femme aux passions violentes, régente aux intrigues ténébreuses, tenait les rênes du gouvernement. Elle les confia aux Guises, qui, déjouant les complots de la faction rivale, devinrent bientôt eux-mêmes d’inquiétants prétendants. Nous ferons, en passant, une mention spéciale des fameux États-généraux de 1560, où la ville de Dourdan eut à se faire représenter comme les autres. Le 12 novembre 1560, par une lettre datée d’Orléans, le jeune roi François II fait savoir à son amé et féal le bailli de Dourdan que, changeant la résolution qu’il lui avait fait antérieurement connaître, de rassembler, le 10 décembre, les États-généraux à Meaux, il venait de décider que ces États se rassembleraient à Orléans, ville plus commode et mieux approvisionnée pour ce grand concours. Dourdan possède la lettre originale de cette convocation[1], qui porte la longue et mince signature du pauvre roi de seize ans. Ce n’est pas lui qui devait présider les orageux débats auxquels il invitait. Vingt-cinq jours plus tard, le 5 décembre, il mourait après quelques mois de règne, et on voyait paraître aux États d’Orléans, tenus du 13 décembre au 31 janvier, Charles IX, son frère, un roi de dix ans. Or, à Dourdan, le 5 décembre, à l’heure même où expirait François, se réunissaient, en vertu de la missive royale, les trois états du bailliage. Comme représentants étaient élus : pour l’état d’Église, discrète personne messire Robert Donde, vicaire de la paroisse Saint-Germain ; pour l’état de noblesse, Ollivier Dugueregnard ; et pour le tiers-état, noble personne Michel de Lescornay, sommelier-bouche de la reine-mère et bourgeois de Dourdan, tous trois chargés de présenter au roi les doléances dudit bailliage.

Nous avons été frappé en lisant, dans le manuscrit conservé par la famille de l’auteur, le cahier des doléances du tiers-état de Dourdan, du ton énergique, indépendant, et quelquefois acerbe, qui règne dans les réclamations et les remontrances adressées à la couronne. Le lecteur trouvera à la fin de ce livre plusieurs extraits que nous en avons faits[2]. On sent, on entend, dans les plaintes contre le clergé, un souffle et un écho de la réforme, et dans l’exposé des griefs contre les nobles, les gens

  1. Elle fait partie des papiers provenant du don récent de la famille de M. Roger d’Étampes.
  2. Pièce justificative XIV. — Ce manuscrit sur parchemin, expédition du temps signée par le greffier Rousselet, est également la propriété de la ville. Il avait été conservé par la famille Roger, qui était alliée aux de Lescornay.
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