Page:Chronique d une ancienne ville royale Dourdan.djvu/301

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
285
LE CHÂTEAU DE REGNARD À GRILLON, ETC.

rasse régnait devant les bâtiments, soutenue par le mur de la ville, qui d’un bout à l’autre coupait la propriété et séparait l’habitation des jardins. C’était pour M. Lévy une très-fâcheuse servitude ; il sut trouver le moyen de s’en affranchir. Le siége de la justice de Rouillon, installé dans l’intérieur de la ville, offusquait le duc d’Orléans. Ce fut l’occasion d’un échange de bons procédés. M. Lévy transporta sa justice hors des murs, et le duc d’Orléans lui concéda, moyennant un sol de rente par toise, les cinquante-sept toises de mur qui le gênaient, avec le droit de faire un parapet à hauteur d’appui. En dehors du mur, régnait le fossé de la ville, de trois toises de large, dans lequel passait le chemin montant de la rue Grousteau à la porte Saint-Pierre. Concession en fut également faite à M. Lévy, et, comme c’était barrer le chemin qui menait aux fontaines Saint-Pierre et Grousteau, il s’engagea à donner au faubourg Saint-Pierre la jouissance du puits de sa basse-cour. Quant au rempart de neuf pieds de large qui courait à l’intérieur du mur, le duc d’Orléans le concédait avec le reste, à la condition de livrer passage au besoin pour faire la ronde. M. Lévy devenait ainsi seul maître sur son terrain, en enclavant une portion du périmètre de la ville et en interceptant la communication de deux quartiers.

Des héritages appartenant à la fabrique Saint-Pierre occupaient une partie de l’emplacement dont M. Lévy voulait faire son parc ; il les acheta[1]. La rue des Bordes, qui de la porte Saint-Pierre gagnait le carrefour de la Croix-Rouge, était un voisinage incommode ; elle fut acquise maison par maison, supprimée et remplacée par une belle avenue d’ormes. Exécuté, dit-on, d’après un dessin laissé par Lenôtre, le parc s’encadra tout naturellement dans le vaste et charmant paysage qui le domine de toutes parts. Au premier plan, de hauts pilastres de grès partageaient l’horizon. Un grand parterre formé de gazons bordés de plates-bandes de fleurs s’étendait au-dessous de la terrasse. Des ifs bizarement taillés, comme on le faisait alors, s’échelonnaient symétriquement jusqu’au rond-point central d’où partaient, en éventail, de nombreuses allées bordées de charmilles qui divisaient les taillis en une foule de compartiments. Au fond, était ce qu’on appelait le labyrinthe, entre-croisement d’allées ingénieusement tracées pour amuser en les égarant les pas du promeneur[2]. Une grande allée d’ormes, terminée par une salle de danse et une échappée sur la campagne, servait de perspective aux fenêtres du corps principal. À côté de la grille qui s’ou-

  1. Moyennant 210 livres de rente annuelle et perpétuelle de bail d’héritage. 23 février 1729. Archives de l’église.
  2. Il existe à la Bibliothèque impériale une gravure qui représente un véritable dédale et qui porte cette légende : « 4o volume des Jardins. Labyrinthe exécuté à Dourdan, chez M. de Verteillac. » — Collection topographique : Seine-et-Oise, Rambouillet, IV, 5. — M. de Verteillac remplaça M. Lévy.