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LE CHÂTEAU.

gement défigurée et si incommode pour la vie privée. Il l’acheta, sachant à peine d’abord ce qu’il pourrait en faire, mais voulant à tout prix la sauver de la ruine et la conserver au pays dont elle est le principal honneur. M. Amédée Guenée employa, pendant onze années, avec une patiente intelligence, son temps et sa fortune à faire déblayer, consolider, réparer tout ce qui subsistait d’intéressant du vieux monument et de son enceinte. Il supprima ces divisions factices et ces appentis parasites réclamés par des services transférés ailleurs. Il débarrassa et nivela complétement l’aire de la cour, et, faisant rapporter de la terre végétale, y dessina une grande pelouse et des massifs. Les mouvements de terrain attestant et recouvrant d’anciennes substructions furent scrupuleusement conservés. Des fleurs vinrent égayer l’austère paysage. Les festons des lierres, la verdure des arbres, les cimes des grands platanes et des vieux noyers des fossés encadrèrent, sans les dissimuler, la ligne des sombres murailles et le profil des tours. La promenade pittoresque et curieuse sur l’épaisseur des murs d’enceinte fut rendue sans danger. La casemate, entièrement débarrassée, put être explorée. Le pont de l’entrée sur la place, nivelé et baissé, fut consolidé. Les fossés, appropriés, reçurent une culture régulière, leurs parois furent reprises avec soin, et leurs assises solidement jointoyées ; un grand escalier permit d’y descendre du côté du midi. La partie habitable, intérieurement remaniée, constitua une demeure modeste mais convenable, où tous ceux qui l’ont connue espéraient voir vivre de longues années l’aimable et généreux propriétaire. Il voulait achever son œuvre et en étudiait la partie la plus difficile, la consolidation du donjon. La mort le surprit, jeune encore, le 30 janvier 1863.

Les archéologues, pour lesquels le service rendu par M. Guenée a un prix réel, nos lecteurs en général, les habitants de Dourdan en particulier, nous permettront, malgré le lien qui nous unit à lui, de donner un public et dernier hommage à un homme de bien qui aimait tant sa ville natale et lui en a laissé tant de preuves[1]. Parmi les souvenirs locaux et les souvenirs de famille, il en est un qu’on doit pardonner aux cités comme aux individus de publier sans scrupule, c’est celui de la reconnaissance.

M. Amédée Guenée, par son testament, laissa en mourant le château à son cousin et ami M. Ludovic Guyot, enfant d’Étampes et de Dourdan. Notre excellent père, après une vie consacrée aux grandes études et aux affaires publiques, ne put jouir, hélas ! que quelques mois de cette paisible retraite. Sa veuve demeure, avec ses enfants, héritière et gardienne de ces lieux qu’elle vénère et qu’elle aime.

Que les fervents admirateurs des vieux monuments de notre histoire,

  1. M. Amédée Guenée a laissé, par son testament, près de cent mille francs pour des œuvres charitables ou utiles dans la commune de Dourdan : restauration de l’église, secours aux malades, livrets d’encouragement aux écoles, entretien des chemins communaux et ruraux, création de lavoir, etc.