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CHAPITRE XVIII.

tin, celui-ci vint prendre possession, le lundi 10 novembre 1664, et voici l’acte qu’il fit dresser :

« …Voullant entrer au chasteau, le sieur de Fortin a trouvé le corps de garde, lequel est entièrement ruyné par le deffault de la couverture qui a causé la pourriture tant de la charpente et sollives que des murs et tout le reste, et de là pour entrer dans ledit chasteau, les barrières du pont rompues, le pont dormant tout pourry en ruyne et prest à tomber et sans pont-levis, estant le plancher d’icelluy tombé dans le fossé, ny ayant que deux aiz avec deux autres pièces et la planchette, sans que charrettes ni chevaux y puissent passer. Les flèches rompues et pourries qui sont estayées et soustenues de quelques pièces de bois ; la herse ancienement ruynée.

« Et estant entré dans le chasteau, la porte s’est trouvée assez forte, mais en plusieurs endroits de pièces pourries à cause de sa vieillesse, où est apparu Pierre Perche, portier dudit lieu, auquel le sieur de Fortin a demandé où sont les armes et les meubles du Roy et luy faire démonstration et ouverture des lieux ; lequel Perche lui a faict responce qu’il n’a cognoissance d’aucuns meubles ny armes et qu’on peult s’addresser aux enffans du feu sieur de Saint-Martin logez ès aistrises du dit chasteau, où se seroit à l’instant ledit sieur de Fortin transporté et y ayant trouvé ces damoiselles leur aurait demandé lesdits meubles et armes et autres choses, lesquelles damoiselles ont dit qu’il n’y avoit aucuns meubles ny armes et que ceux qui y avoient esté ont esté enlevez par ordre de feu monsieur le comte de Nogent lors gouverneur du chasteau, dont elles ont bonne descharge par escript, sinon un grand viel coffre magazin sans fonds ruyné et rompu et trois planches de bois servant de tables de cuysine sans tretteaux de nulle valleur ; comme de faict en touttes les chambres, magazins et autres lieux ne s’est rien trouvé, ains seullement les ratelliers desnuez de leurs armes et dans le fond d’une tour dont on n’a pu trouver la clef, quelque petit reste de poudre et plomb dans un poinson, de celle qui avoit esté amenée de Corbeil pendant le siége d’Estampes en 1652, et quant aux chambres, greniers et aistrises du château, se sont tous trouvez inhabitables, par le deffault des couvertures toutes ruynées, planchers pourris, lucarnes tombées, croisées pourries sans fermetures ne vittres et les planchers descarlés et ruynés, ce que ne menace pas moins que de tomber en une entière ruyne s’il n’y est promptement pourveu. »

Il y fut pourvu, avec économie, lorsque, huit ans après, le château de Dourdan, donné en apanage au duc d’Orléans, fut préalablement « mis en état. » Mais comme le seigneur n’y résidait pas, on se contenta des grosses réparations indispensables, et les appartements demeurèrent inutiles et fermés. Veut-on savoir quels étaient alors les hôtes de ces vieilles murailles solitaires ? — Des tableaux de maîtres italiens, de lumineuses toiles vénitiennes ou florentines enfermées sous clef dans l’obscurité,