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CHAPITRE XVI.

découvrir du moellon. La rue de Chartres, le boulevard du Château devinrent un chantier, et depuis le cimetière jusqu’à l’église, on se mit en devoir de piquer du grès. Le samedi 16 mars 1690, après messe du Saint-Esprit et procession, la première pierre fut posée par le lieutenant-général et bénite par messire Antoine Lebrun, curé et official. Ce n’est pas sans peine que les marguilliers conduisirent à bonne fin leur entreprise : difficultés avec les entrepreneurs au sujet des prix[1], procédures, sentences du bailliage, rigueurs de l’hiver 1690, retardèrent souvent les travaux qu’inspectait le sieur Faisant.

Enfin le nouveau bâtiment s’acheva. Construit presque entièrement en grès, il formait extérieurement une sorte d’annexe. Intérieurement, il offrait une belle chapelle polygonale bien éclairée par quatre longues baies et dont la voûte rappelait le style réticulé du xvie siècle. Le bas-côté, prolongé entre la chapelle et le maître-autel, dégageait le chœur et il était enfin permis de faire le tour de l’église. Les deux autels latéraux qui s’élevaient en face des bas-côtés furent légèrement reculés et continuèrent à se faire pendant, de chaque côté de l’entrée de la nouvelle chapelle. L’un d’eux, celui de gauche, cessa dès lors d’être consacré à la Vierge, et sa décoration, très-mesquine pour l’emplacement, fut provisoirement transportée dans le bâtiment neuf. Une table de marbre noir, au-dessus de l’entrée, porta gravée en lettres d’or l’inscription : « D. O. M. Virginique matri » et une autre pierre, ornée des armes de la ville, du roi et de Monsieur, dressée contre le mur, non loin de la sacristie, rappela la date de cet agrandissement de l’édifice[2].

  1. Cette question des anciens prix intéressant aujourd’hui certains érudits, nous en relevons ici quelques-uns :

    339 liv. pour 108 toises de pierre de moellon à 55 s. et 3 liv. la toise.

    209 liv. à Vernet, voiturier, pour les arrivages de la pierre à 100 s. la toise, du grès à 10 s. — Ce prix, à ce qu’il paraît, était si modique, que Vernet ne put gagner sa vie et abandonna le travail, dont aucun laboureur ni voiturier du pays ne voulut se charger à moins de 6 à 7 liv. pour la toise de moellon et 20 s. pour la toise de grès.

    3,111 liv. données aux maçons ; — 891 liv. aux fendeurs de grès de Sainte-Mesme ; 2,204 liv. aux piqueurs de grés ; — 2,082 liv. pour le transport du grès de Lyphard, et des pierres et sables de la Fresnaye, la Brière, Rochefort ; — 423 liv, pour 156 poinçons de chaux vive ; plus, 942 liv. d’autre part ; — 500 livr. pour charpentes ; plus, les bois de la forêt ; — 4,800 liv. payées au sieur de la Rousse, entrepreneur du dit bâtiment, en 1695. — Archives de l’Église.

  2. La pierre subsiste avec les armes, et porte ces mots :

    CE BASTIMENT
    A ESTE FAICT DES DENIERS
    DE CETTE EGLISE A LA DI
    LIGENCE DE Me CLAVDE MICHAV
    CLAVDE HOVSSV ET FRANÇOIS DVCHON
    MARGVILLIERS ES ANNEES 1689 ET
    1690 SOVBZ LE REGNE DE LOVIS LE
    GRAND XIV
    DV NOM ROY DE FRANCE
    ET DE NAVARRE.