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CHAPITRE XIV

une faveur. Trois des membres de l’illustre famille de l’Hopital Sainte-Mesme, dont la seigneurie était enclavée dans celle de Dourdan et en absorbait presque le territoire, furent tour à tour baillis de Dourdan au xviie siècle, et on ne peut guère ouvrir un acte civil ou judiciaire de cette époque sans trouver en tête leur nom. Nicolas de Bautru, l’ami de Louis XIII, avait aussi joui du même titre. Au commencement du xviiie siècle, le marquis d’Effiat, le poëte Regnard, seigneur de Grillon, et Michel Lévy, grand propriétaire du pays, se transmirent la charge. Mais depuis la mort de ce dernier, c’est-à-dire depuis 1738 jusqu’en 1787, pendant l’espace de cinquante ans, la place demeura vacante et le lieutenant-général s’intitula dans tous les actes garde scel du bailliage attendu le décès de Monsieur le Bailli. Dourdan reprit néanmoins son bailli d’épée aux dernières heures de l’ancien régime et envoya sous ce titre, comme représentant aux États Généraux de 1789, le prince de Broglie de Rével, beau-frère du marquis de Verteillac.

La charge de lieutenant-général, laborieuse mission qui avait été dévolue à Pierre Boudon, en 1585, pendant les années troublées et malheureuses de la Ligue, fut exercée par lui durant quarante-cinq ans, sous Henri IV et Louis XIII, et reprise par son gendre Julien Guyot. En 1639, elle fut confiée, pour n’en plus sortir pendant un siècle et demi, à une très-honorable et très-ancienne famille du pays dont cinq membres portèrent successivement sur ce premier siége de magistrature un dévouement héréditaire. Cette famille, alliée aux plus nobles et aux plus antiques maisons de Dourdan (aux Lucas, les bienfaiteurs de l’Église au xve siècle ; aux Boutet, ces descendants du fameux privilégié de Chalo Saint-Mards, Eudes-le-maire ; aux Gouin, aux Le Roux, aux Pelault, ces administrateurs de Dourdan au xvie siècle ; aux de Lescornay que nos lecteurs connaissent bien ; aux d’Hémery, aux Saint-Pol, etc.), n’est point oubliée de la génération actuelle, et Dourdan aime à enregistrer dans ses annales les bons et loyaux services de Richard le Boistel, lieutenant-général pendant plus de cinquante ans, des deux Pierre Vedye qui siégèrent l’un après l’autre durant soixante-deux années, des deux Messieurs Roger qui eurent à lutter dans de tristes jours contre tous les assauts précurseurs de la crise qui les renversa[1].

La prévôté avait toujours, jusqu’au xviie siècle, existé à Dourdan à côté du bailliage et formé un premier degré de juridiction, dont les appels se portaient devant le lieutenant-général. En pratique, il y avait eu parfois des lacunes dans l’ordre de succession des prévôts, et le bailli ou son lieutenant, cumulant deux charges, avaient été quelquefois dits gardes du scel de la prévôté. La chose se généralisa, se régularisa en quelque sorte en octobre 1661. Anne d’Autriche, ayant alors démembré du

  1. Dourdan conservera, dans ses nouvelles archives, les brevets originaux des diverses charges exercées par cette famille.