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CHAPITRE I.

à mi-côte sur le versant de la vallée exposé au midi, dominé par les grands clochers de son église et le donjon de son vieux château. Presque circulaire, contenue dans une enceinte de murailles fortifiées, prolongée seulement par quelques faubourgs, bordée plutôt que traversée dans sa partie inférieure par la rivière d’Orge, la ville est coupée dans le sens de sa longueur par deux voies principales, qui relient ses quatre portes et auxquelles toutes les autres rues viennent aboutir. L’église, le château, la place de la halle, occupent le centre. La rivière, qui prend sa source à deux lieues de là, au village de Bretencourt, forme en se divisant une sorte d’île au pied des murailles de Dourdan. A l’est et à l’ouest s’étendent des prairies qui étaient autrefois des étangs ; sur les pentes, jadis cultivées en vignes, les champs s’étagent et rejoignent la plaine. Au nord la forêt de Dourdan, au sud-ouest les bois de Louye couronnent de verdure la cime des coteaux et complètent un paysage dont la variété, l’harmonie et le calme intéressent l’œil en le reposant.

Urapiorum felix regio, « l’heureux pays de Hurepoix[1], » disaient les anciens géographes en parlant de la province à laquelle ils donnaient Dourdan pour capitale ; et à leurs yeux cette contrée où s’entremêlaient bois, prairies, moissons, vignes et vergers, était un contraste, un dédommagement créés tout exprès par la nature à côté de la région moins favorisée du Gâtinais, Wastinium, pays des « Gastines » sablonneuses ou forestières. Aussi mal défini comme origine que comme étendue, le Hurepoix était ce pagus Huripensis, Heripensis, Mauripensis ou Morivensis, dans lequel venait se confondre le Châtrais ou Josas, et dont Dourdan, Chevreuse, Corbeil, la Ferté-Alais, Palaiseau étaient les villes principales[2], tandis que le Gâtinais revendiquait les duchés d’Étampes, de Nemours, le comté de Rochefort et quantité d’autres seigneuries.

Géologiquement, Dourdan appartient encore à la Beauce ; il est situé sur un des anciens rivages de ce grand lac d’eau douce qui expirait tout près de là, dans les sables, au nord et au nord-est, et dont l’immense bassin se creusait au sud-ouest, rempli jusqu’au bord du sédiment calcaire témoin irrécusable de ses flots disparus.

Aussi loin qu’on peut remonter dans l’histoire, on trouve tout ce vaste espace entre Paris et Orléans couvert de grandes et impénétrables forêts, dont celles de Saint-Germain, Rambouillet, Dourdan, Orléans, Fontainebleau, etc., ne sont que des lambeaux détachés. Au cœur de ces forêts, qui étaient elles-mêmes le cœur de la Gaule, les Carnutes apparaissent comme les antiques possesseurs du sol. Au temps de César, l’homme avait déjà morcelé par le défrichement et coupé par des voies cette vaste agglomération de bois. La portion qui s’étendait sur les confins de la

  1. Papirius Masson, Description de la France par les fleuves. — G. Morin, Hist. du Gâtinais et du Hurepoix.
  2. Guérard, Provinces et Pays de la France, Annuaire de la Soc. d’hist. de France, an. 1837.