Page:Chronique d une ancienne ville royale Dourdan.djvu/156

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
142
CHAPITRE XIII.

Jean du Cerceau, conseiller du roi et de son altesse royale, lieutenant en la maîtrise des eaux et forêts de Dourdan, ayant fait cette acquisition, vint s’établir à Grillon avec sa femme Antoinette des Érables. Bien que les biographies mentionnent Paris, on a souvent répété que le célèbre jésuite et poëte latin, le père du Cerceau, était né à Dourdan ; ses parents possédaient effectivement Grillon à l’époque de sa naissance (1670).

Etienne Le Large de Ruys acheta Grillon, le 23 septembre 1676, de Jean du Cerceau. Il était conseiller du roi, maître des requêtes du conseil du duc d’Orléans et contrôleur général de la maison de la duchesse ; il trouva quelque intérêt à s’établir sur le nouveau domaine de son maître. Il fit démolir l’ancien manoir de Grillon et construire un château qui, bien qu’il fût de proportions restreintes, contribua à l’endetter. A sa mort, Marguerite de Bonnière, sa veuve, vendit Grillon moyennant 18,000 livres, dont 8,000 comptant et 10,000 représentées par une rente de 500 livres, à un personnage célèbre dont le nom et le souvenir vivent encore dans notre vallée, à Jean-François Regnard, le poëte (22 juillet 1699).

C’est dans un chapitre spécial que nous parlerons du séjour de Regnard à Grillon. Il y passa les dernières années de sa vie en joyeuse et noble compagnie, y composa plusieurs de ses plus spirituelles comédies et la relation des pérégrinations de sa bizarre existence. Il y mourut non moins bizarrement, le 5 septembre 1709, et ses héritiers vendirent, le 7 mars 1710, la maison, le moulin et les terres de Grillon pour 21,000 livres, et le mobilier pour 2,000 livres, à Nicolas-Joseph Foucault, chevalier, marquis de Magny, lieutenant de la grande vénerie du roi, lieutenant général des armées du roi d’Espagne et fils de l’estimable administrateur et antiquaire Foucault. Regnard devait toujours 10,000 livres sur sa maison, et on racheta la rente de 500 livres.

M. de Magny possédait encore Grillon en 1771. Le chevalier de Maupeou le vendit le 15 novembre 177.3 au sieur Duclos, moyennant 50,000 livres, qui ne lui furent sans doute pas payées, car nous trouvons une seconde vente du chevalier de Maupeou, le 4 novembre 1779, moyennant 40,000 livres, à M. Lebrun, alors attaché au chancelier de Maupeou, plus tard prince et architrésorier de l’empire. C’est la terre de Grillon qui a attiré M. Lebrun dans un pays dont il n’a pas cessé de faire sa résidence favorite, et où il s’est plu à exercer sa bienfaisance. Nous dirons ailleurs[1] les jours tour à tour paisibles et agités qu’il passa à Grillon, et le rôle joué par le modeste château de Regnard durant la période révolutionnaire de notre histoire.

Le fief de Grillon, comme on le remarquera en passant, avait vu, par suite de transmissions successives, se multiplier et se croiser ses liens

  1. Voir le chapitre de Dourdan en 1789.