Page:Choix de discours de réception à l'Académie françoise, tome I, 1808.djvu/507

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t pas de me livrer à cette idée, qu’il me seroit doux de l’adopter ! Elle me rappelleroit nécessairement que ces travaux furent partagés par un homme de lettres[1], qui dès long-temps partage tant avec moi.

Pardonnez ce mouvement à un ami sensible, Messieurs, je parle dans un temple dont l’amitié elle-même posa les premiers fondemens. C’est ici que des sages, réunis par les mêmes principes, les mêmes goûts et les mêmes vues, moins fiers de leur propre mérite que du mérite de leurs confrères ; plus sensibles au doux commerce du cœur qu’au commerce brillant de l’esprit, viennent resserrer les nœuds et recueillir les avantages de leur union, de leur amitié, de ce sentiment vertueux et durable, qui ne sait ni flatter, ni feindre, ni s’alarmer, ni s’aigrir ; qui lève nos incertitudes, développe et raffermit nos idées, diminue nos peines, ajoute à nos plaisirs ; qui étend, qui agrandit notre existence, et nous la rend plus chère. Ô vous, dont l’ame aride ou superbe refuse de s’ouvrir à la douce et tendre amitié, vous qui croyez pouvoir vous suffire à vous-mêmes, ah ! combien vous gémiriez d’avoir à porter tout le poids de vos irrésolutions et de vos projets, de vos craintes et de vos espérances, de vos prospérités et de vos revers ! Condamnés à voir vos jours s’écouler, ou dans les tourmens

  1. M. Suard