Page:Choix de discours de réception à l'Académie françoise, tome I, 1808.djvu/500

Cette page n’a pas encore été corrigée

au nom de ce Prince déplorable ; Médicis l’entraîna dans le crime, mais il étoit né avec de la grandeur ; Amyot et Cipierre avoient nourri son ame de principes vertueux ; il aimoit les lettres[1] ; elles règnent sur les ames ; les Rois, selon lui, ne dominent que sur les corps. Charles IX se trompoit, les Rois règnent sur les ames quand ils le veulent, et Charles IX lui-même appelant Ronsard à Amboise par des vers plus naturels que tous ceux de ce Poète[2], ou allant chercher ce même Ronsard et ses amis dans la solitude de Saint-Victor, pour penser avec eux, déposant la Majesté royale, et permettant aux lettres de confondre les rangs, Charles IX alors régnoit sur les ames. S’il n’eût écouté que les accens des Muses et que les leçons d’Amyot, la France n’auroit point à rougir de cette nuit affreuse dont il faut qu’elle conserve le souvenir, pour craindre toujours le fanatisme.

  1. L’art de faire des vers, dût-on s’en indigner,
    Doit être à plus haut prix que celui de régner ;
    Ta lyre, qui ravit par de si doux accords,
    T’assuroit les esprits dont je n’ai que les corps ;
    Elle t’en rend le maître, et te fait introduire
    Où le plus fier tyran ne peut avoir d’empire.
    (Vers de Charles IX à Ronsard).
  2. Il faut suivre ton Roi qui t’aime par sur tous,
    Pour les vers qui de toi coulent nobles et doux ;
    Et crois si tu ne viens nous trouver à Amboise,
    Qu’entre nous surviendra une très grande noise.
    (Du même au même).