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homme capable de remplacer dignement un académicien de ce mérite, vous avez voulu du moins en choisir un qui ayant été lié d’une étroite amitié avec lui durant sa vie, pût vous en renouveller continuellement la mémoire.

Je le ferai, Messieurs, aussi long-temps et aussi souvent que vous me le permettrez ; et si ce n’est avec des paroles dignes de vous et de lui, ce sera du moins avec le zèle et la fidélité d’un homme qui, ayant été près de vingt années son ami de toutes les heures, doit savoir et sentir mieux qu’un autre combien il mérite d’être regretté.

Jamais peut-être personne ne vint au monde avec un plus heureux génie pour les lettres, et cet heureux génie fut secondé par une excellente éducation.

Dès son enfance, charmé des beautés qu’il trouvoit dans les anciens, et qu’il a si bien imitées depuis, il s’enfonçoit tout seul dans les bois de la solitude où il étoit élevé, il y passoit les journées entières avec Homère, Sophocle et Euripide, dont la langue lui étoit déjà aussi familière que la sienne propre, et bientôt mettant en pratique ce qu’il avoit appris de ces excellens maîtres, il produisit son premier chef-d’œuvre dans un âge où l’on compte encore pour un mérite de savoir seulement réciter les ouvrages des autres.

Le fameux Corneille étoit alors dans sa plus