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du Voyage de Siam.

23. Janvier.

NOs pilotes ont eſté fort étonnez ce matin de voir terre : ils croyoient avoir depaſſé l’Iſle des Cocos, & s’en faiſoient à plus de vingt-cinq lieuës. Bien nous a pris d’avoir veu clair : nous faiſions le Soroueſt avec confiance, & allions à pleines voiles donner ſur l’Iſle ; cela n’euſt pas eſté ſain la nuit. Il n’y a point de lune : cette terre eſt fort baſſe ; nous euſſions eſté deſſus avant qu’on s’en fuſt apperceu. Ils diſent pour s’excuſer que les courans viennent de l’Oueſt, & nous ont ſoutenus plus qu’on ne ſçauroit dire. J’ai remarqué que les courans ſont d’un grand ſecours aux pilotes ; & quand ils ſe ſont trompez, ils s’en prennent toujours aux courans.

24. Janvier.

PLuie continuelle. Deux heures de bon vent, & puis les voiles batent les mâts. Nous avons eſpérance à la nouvelle lune : c’eſt ce ſoir ; mais il faut lui donner le temps de s’évertuer.

Il n’y a pas moyen de prendre hauteur. Nous allons toujours un peu, & faiſons l’Oueſt Soroueſt. Tout l’air eſt embrumé : de temps en temps des grains qui ôtent le peu de vent qu’on a. On ne voit que poiſſons : on en prend peu ; c’eſt aſſeurément la faute de nos peſcheurs. Ils s’amuſent à la ligne, & ne ſe veulent pas donner la peine de harponer.