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du Voyage de Siam.

pitres des Eſſais de Morale : une fondation à perpétuité d’un Chapitre de l’Evangile, que je lis tous les ſoirs avec M. Baſſet, qui m’en explique les endroits les plus difficiles : un peu de muſique. Nous ſçavons paſſablement le plein-chant, & dans un village on porteroit fort bien la chape. De temps en temps la promenade ſur le pont, quelque petite converſation avec les pilotes, regarder ſur la Carte : nous ſommes ici, nous eſtions-là hier, ſi nous pouvions eſtre-là demain. Les prieres publiques, les particulieres, l’heure du bréviaire, le dîné, le ſoupé, une partie d’échecs pour la récréation. Les jours vont ſi vîte. Je ſçai bien que je ne deviendrai pas un bon pilote, ce n’eſt pas ma vocation ; ni un bon Mathématicien, le métier m’en paroît trop ſec : mais au moins je ſçaurai le Portugais, & en dépit de vous le Siamois. Les Mandarins m’ont écrit ce matin, une lettre pour ſe réjouir de mes progrès dans la plus belle langue du monde. J’ai fort bien leu la lettre, & l’ai preſque toute entendue ; & ſur le champ leur ai fait réponſe en pur Siamois. Il eſt vrai qu’on m’a aidé à faire mon theme. J’ai cru eſtre en quatriéme, & écrire une lettre à mon pere pour lui demander mes étreines. Je commence à y prendre plaiſir ; & ſuis ſeur, moralement parlant, de parler Siamois à Siam. Euclide ira juſqu’où il pourra, tant que j’aurai le Pere Tachart ; & la Sphere, tant que j’aurai le Pere

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