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Jeunes sos les yeux à fleur de tète, les pommettes saillantes, les lèvres ourlées, répugnantes et attirantes, le bas de la face allongé, une fine barbe blonde et mousseuse, des yeux de rêve et de folie, voilà le Rédempteur slave, mélange de Raspoutine et de saint François, dont, pendant quelques années, on pourrait croire que la littérature anglaise a subi l'inspiration équivoque. Quelques années seule- ment. Le Christ d'Epstein, qui fit plus tard accourir les pèlerins artistiques, est uhe figure d'une autre puissance. Le sculpteur lui a donné la carrure sans grâce, sans charme, sans forme, de l'homme qui vient de passer à travers l'ombre de la mort, et qui émerge, austère, émacié, mais triomphant et presque dédaigneux, d'un abîme de douleurs. Il montre ses larges mains saignantes et percées, mais sa tète nette et massive, triste et hardie, se redresse avec un geste viril, et reprend, avec la vie, la direction du destin. Tel est le sens que semblent pren- dre aussi la fiction et la vie britanniques. Mais c'est anti- ciper. A la période d'influence russe, entre 191a et 1916", correspond un amorphisme inconscient de la littérature, qui fut une réaction contre la plastique française de l'âge précédent. Or, les maîtres français, qu'ils soient de grands artistes, comme Flaubert et Maupassant, des écrivains massifs et puissants comme Zola, des maîtres exquis de l'ironie et de la grâce intellectuelle comme Anatole France, apportent dans leur œuvre quelque chose de fini, de précis. Leur œuvre, à son tour, laisse au lecteur une impression plus ou moins puissante, plus ou moins esthétique, mais une impression nette, susceptible de définition. Ils sont, comme on l'a dit, plus clairs que la vie, — qui n'est pas claire. Ils la simplifient pour l'exprimer. Mais ils l'expriment. Il y a de l'intelligence JafeedbvGoOgle

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