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Une de ses mains apparaît encore crispée au rocher.

Dubreuil casse les branches du bouleau, s’agenouille sur son pont improvisé, tend le bras, saisit cette main, et déployant toute sa vigueur, il ramène à la surface la tête et le buste du Peau-Rouge.

Mais celui-ci est affaibli, brisé par la lutte effroyable qu’il a soutenue, qu’il soutient encore.

Du geste, plutôt que de la voix, le Français l’encourage, tandis que, lui passant les bras autour de son cou, il s’arcboute, se relève peu à peu, et finit par le tirer entièrement de l’entonnoir.

— Sauvé ! et j’en remercie Dieu ! dit le brave Adrien, en s’essuyant le front, après avoir déposé le sauvage sur la tête du bouleau, dont une partie seulement trempe dans la rivière.

Comme il murmurait cet acte de reconnaissance, l’arbre, resté jusque-là à peu près immobile, s’ébranle.

Les filaments qui l’assujettissaient à sa racine ont cédé sous le poids des deux hommes : ils s’allongent ! ils rompent !

Le Trou-de-l’Enfer hurle déjà plus fort : plus vite, plus vite et plus vite il roule ses mortelles spirales. Dans un froid linceul ensevelira-t-il donc deux cadavres au lieu d’un ?

L’Indien est là, impassible, résigné. Ses lèvres remuent. Sans doute il a entonné un chant de mort.

Pauvre Adrien ! il songe à sa mère, à sa bonne et tendre