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Pour n’être pas positivement un poltron, l’ex-cavalier de 1re classe ne se sentait pas à l’aise dans cette caverne, aux murailles fantastiques, armées, comme une herse, de pointes longues, lourdes, aussi affilées que des aiguilles, ou de masses colossales de toutes formes, et dont quelques-unes ne paraissaient soutenues que par un fil.

Il frémissait à la pensée que la chute d’un seul de ces mille pendentifs, que les lueurs du jour, faiblissant à mesure qu’ils avançaient, éclairaient de teintes lugubres, les submergerait à tout jamais, dans un abîme dont la transparence extraordinaire du lac, sous la voûte, rendait l’horreur plus grande encore.

Lui, qui eût affronté en souriant la mort sur un champ de bataille, il en concevait là une épouvante qui glaçait son sang et baignait ses membres d’une sueur froide.

Le silence de la tombe régnait dans ces lieux, que les anciens eussent assurément pris pour la porte de leur Ténare : il en doublait l’effroi.

Tout à coup retentit le ruissellement de deux avirons battant l’eau avec violence.

— Ah ! je te tiens enfin ! braille le lieutenant du Mangeux-d’Hommes.

Et dans la caverne s’élance, comme un loup sur sa proie, le canot que dirige Judas.

— Oui, je te tiens ! répète-t-il avec les accents d’une