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les regarder sans que quelque crainte se mêle à son admiration.

Ici, c’est un paysage avec des arbres dont vous reconnaissez l’essence, le mur d’un parc ou d’un jardin, une pièce d’eau, et, tout à fait dans le fond, broute un troupeau conduit par un berger ; là, coulant du faîte des rochers, les eaux, trempées de minerai de fer ou de cuivre, ont peint un château gothique. Et quel château ! Un séjour de géants. Il a deux cents pieds de haut, ses fenêtres ogivales, avec leurs vitraux en losange, en ont cinquante ou soixante, et ses portes crénelées, flanquées de tourelles, une centaine au moins !

Passons à cette plaque de granit, veinée comme de l’agate et resplendissante de mille feux aux rayons du soleil. Le morceau embrasse vingt pieds carrés. Essayer de décrire la variété, la richesse de ses tons, impossible ! impossible ! l’imagination y échouerait elle-même.

Mais j’aperçois flamboyer, sur cet immense rempart, cette œuvre cyclopéenne dont l’étendue, l’altitude, trompent mes sens ; j’aperçois flamboyer un incendie. C’est une forêt en feu. La fumée roule en larges spirales ; à travers ses nuages épais scintillent des flammèches ; les arbres se rompent, ils chancellent, roulent à terre, des troncs embrasés s’échappent des tisons ardents ; ne vous semble-t-il pas entendre le bruit de leur chute…