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Meneh-Ouiakon avait résolu d’y camper pendant la nuit, et de traverser le lendemain la presqu’île, son canot sur les épaules, ce qui devait abréger sa course de près de trente lieues.

Le portage[1] a deux mille pas de longueur.

La jeune fille était trop fatiguée pour le faire ce soir-là. Elle s’arrêta à la pose, à vingt pieds au-dessus du niveau du lac, et, avec sa peau de veau étendue sur deux piquets, se dressa une petite tente.

Après avoir pris quelques aliments, elle s’étendit sur le sable, sous sa tente, et tomba dans un profond sommeil, dont elle ne fut tirée que par cette exclamation échappée au plus bruyant enthousiasme :

— Cent mille millions de carabines ! la jolie créature pour une sauvagesse, sans t’offenser, mam’selle !

Meneh-Ouiakon s’était éveillée en sursaut. Elle bondit sur ses pieds avec la vivacité d’une panthère, et darda sur le perturbateur de son repos un regard incisif.

Aux naissantes clartés de l’aube, elle vit un personnage singulier, étirant complaisamment de longues moustaches jaunes, qui la contemplait avec une vivacité rien moins que modeste et dont le sens ne trompa point la jeune Nadoessis.

— Oui, là, vraiment, tu es fièrement belle pour une

  1. Pour la signification de ce terme, voir la première série des Drames de l’Amérique du Nord.