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— Sans cela, sans ce carré de bois, vous m’eussiez laissé périr, dit Dubreuil d’un ton sombre.

L’Indienne ne répondit pas.

Il y eut un moment de pénible silence, à peine troublé par les sourds rugissements de la tempête qui déferlait au dehors.

— Ah ! soupira le malade, je comprends. Mais ce n’est pas ainsi que je voudrais être aimé, pas ainsi que les femmes aiment dans mon pays… Vous auriez mieux fait de m’abandonner à mon sort.

— Je croyais que mon frère était un homme fort. Nos jeunes guerriers ne savent pas pleurer. On les babillerait en femmes ceux-là qui verseraient des larmes.

— Mais que deviendrai-je ? Je n’avais ici qu’un ami ; il est perdu. Maintenant, me voici captif, grelottant la fièvre, estropié et condamné à ne plus voir la lumière du jour ; car, dans ce cachot règne une nuit éternelle, et l’air respirable n’arrive que difficilement par quelques fissures imperceptibles.

— L’impatience, mon frère, est l’arme des faibles. Prends courage, et tu sortiras d’ici.

— J’aimerais mieux n’en sortir jamais que de vous laisser au milieu de ces brigands.

— De qui mon frère veut-il parler ?

— Eh ! de celui que vous appelez le Mangeux-d’Hommes et de ses complices ! répliqua-t-il avec irritation.