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MADAME IDA PFEIFFER


Les motifs qui déterminent à entreprendre de grands et périlleux voyages varient, pour ainsi dire, avec les tempéraments. Chez les uns, c’est l’impulsion de la curiosité ; chez d’autres, la soif du changement ; pour un certain nombre, un puissant et sincère amour de la science ; ou bien encore une impatience naturelle de l’inaction, une rébellion contre la banalité et la monotonie de l’existence ordinaire ; enfin le goût des aventures. Cependant on peut diviser en général les voyageurs en deux classes : ceux qui découvrent et ceux qui observent ; ceux qui pénètrent dans des régions que n’a pas encore foulées le pied de l’homme civilisé et enrichissent de nouvelles contrées les cartes géographiques, et ceux qui suivent simplement les traces de précurseurs plus hardis ou plus heureux, recueillant à la suite de ceux-ci des données qui complètent les leurs propres et les surpassent parfois en précision.

C’est à cette dernière catégorie qu’appartiennent nos voyageuses, parmi lesquelles on ne saurait trouver d’émule ni de rivale aux grands pionniers comme Livingstone, Barth ou Franklin, à une seule exception près, et cette exception est la femme extraordinaire dont nous allons parler. On peut dire de Mme Ida Pfeiffer qu’elle a droit de figurer au premier rang des voyageurs célèbres, et que les résultats scientifiques de ses explorations sont aussi curieux qu’intéressants. Quelqu’un a fait à son sujet cette observation, que si une nature douée d’autant de persévérance, de courage, de ténacité, avait eu à son service des forces masculines, l’histoire compterait un capitaine Cook