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LES VOYAGEUSES ANGLAISES

leurs bottes de cuir de cheval. Les femmes ont à peu près le même costume ; mais, au lieu du chiripa, elles portent sous le manteau une espèce de robe flottante qu’elles attachent au cou avec une broche ou une épingle d’argent. Les enfants restent complètement nus jusqu’à cinq à six ans, et sont alors habillés comme leurs parents. Moitié pour s’embellir, moitié pour se protéger contre les morsures du vent, beaucoup de ces indigènes se peignent le visage ; leur couleur favorite est le rouge, autant que j’en ai pu juger ; mais j’en ai remarqué un ou deux qui avaient donné la préférence à une combinaison de rouge et de noir, grâce à laquelle ils avaient l’aspect le plus diabolique. »

Nous ne pouvons suivre lady Florence Dixie dans sa promenade à travers la Patagonie, qui, par sa variété infinie d’impressions, a dû amplement satisfaire le besoin qu’elle éprouvait de voir du nouveau. Elle y a chassé des pumas, des autruches, des guanacos ; elle a assisté aux courses folles et fougueuses des chevaux sauvages dans ces pampas qui leur appartiennent depuis des siècles ; elle y a souffert de la chaleur et des moustiques, exploré les recoins des Cordillères, découvert un beau lac que, selon toute probabilité, nul œil humain n’avait encore contemplé. Enfin, fatiguée d’aventures, elle et ses compagnons sont revenus chercher avec plaisir dans la vieille Europe le banal bien-être qu’y offre la civilisation. Lady Florence raconte tout cela et bien d’autres choses avec beaucoup d’animation, et dans un style qui, s’il n’a pas de mérites littéraires hors ligne, est toujours clair et vigoureux. On peut agréablement passer une heure au coin du feu avec le livre de lady Florence Dixie, et en le refermant on se sentira convaincu que l’auteur est une femme courageuse, spirituelle et intelligente, qui n’est embarrassée d’aucune situation, même imprévue ou dangereuse.

Une de ses compatriotes ne lui cède ni en courage ni en fermeté, et lui est très supérieure sous le rapport littéraire miss Gordon Cumming, qui occupe, on peut le dire, le premier rang après Ida Pfeiffer parmi les grandes voyageuses. Avec une infatigable ardeur, elle a poursuivi son tour du monde et pénétré dans les régions inexplorées et presque inaccessibles du grand plateau asiatique. Son premier livre : Des Hébrides à l’Himalaya[1], attira l’attention par la fraîcheur des esquisses, la grâce du style, l’absence de toute banalité,

  1. From the Hebrides to the Himalaya, by Miss Gordon Cumming.